Beaucoup de personnes assignées femmes à la naissance font le choix de ne pas ou plus recourir aux contraceptifs hormonaux (que ce soit sous forme de pilule, d’implant, de patch, d’anneau vaginal ou de DIU) en raison de leurs effets secondaires : troubles de l’humeur et de la libido, prise de poids, augmentation des risques cardio-vasculaires, incompatibilité avec la consommation de tabac… Ou bien en raison de leur caractère contraignant (penser à prendre la pilule, à changer le patch ou l’anneau), ou bien encore pour ne pas/plus avoir de corps étranger en soi (DIU).*1
Le DIU constitué de cuivre ne présente pas les effets liés aux hormones mais reste un corps étranger susceptible de provoquer une hausse des saignements, d’augmenter un état inflammatoire et de présenter un inconfort lorsqu’il est mal posé ou qu’il bouge.
Souhaitant ne pas subir ces inconforts sans renoncer à la contraception, de nombreuses personnes font alors le choix (parfois par dépit) de l’utilisation systématique du préservatif. Notons que c’est le seul mode de contraception qui soit dans le même temps un moyen efficace de se protéger des infections et maladies sexuellement transmissibles (s’il est également employé lors des rapports bucco-génitaux bien évidemment, sous forme de digue éventuellement).
Et les gynécologues ne vont généralement pas plus loin dans la démarche de la recherche de la contraception la plus adaptée aux personnes qui les consultent. A défaut d’hormones ou de DIU, ce sera le préservatif et … c’est tout !
Je voulais donc aborder ici trois méthodes de contraception qui sont encore considérées comme alternatives, peu connues des gynécologues pour deux d’entre elles, connue mais complètement négligée voire niée pour la dernière… Car choisir une contraception adaptée nécessite de connaître toutes les possibilités qui s’offrent à nous, pour faire un choix libre et éclairé, indépendamment de ce qu’un.e gynécologue pense être le mieux pour nous.
PETITE PRÉCISION AVANT DE RENTRER DANS LE VIF DU SUJET
La contraception est une charge qui relève de la responsabilité des deux sexes et devrait être envisagée comme telle. Que ce soit dans le choix de la contraception, dans son financement, ou simplement dans le fait d’y penser (penser à acheter/utiliser des préservatifs, penser à prendre la pilule ou changer le patch, envisager une contraception dite masculine etc.)
1- LA SYMPTOTHERMIE
Reine des méthodes dites « naturelles » de contraception dites féminines, c’est aussi la plus fiable d’entre elles. La symptothermie repose sur l’observation quotidienne de trois paramètres chez la femme : température corporelle au réveil (à heure fixe), apparence et texture des glaires cervicales et aspect du col de l’utérus. La synthèse de ces observations permet de déterminer avec une précision étonnante les périodes du cycle menstruel, donc de fécondité. Une fois la période de fécondité déterminée, il convient de prendre les précautions nécessaires pour éviter une grossesse (par exemple en s’abstenant sur cette période ou bien en utilisant des préservatifs).
Cette démarche nécessite une période d’apprentissage pour maîtriser les subtilités de ces observations et en tirer des informations pertinentes sur la fécondité. Par ailleurs, des changements dans le rythme de vie, le stress ou la maladie sont des paramètres qui font varier la fiabilité des observations et doivent également être consignés dans le document de synthèse.
Cette méthode, lorsqu’elle est pratiquée rigoureusement, s’avère après plusieurs mois être assez fiable. Elle n’est pour autant pas aussi fiable que les contraceptions « conventionnelles » et ne devrait à mon sens n’être employée que par des personnes ne craignant pas de devenir enceintes (On parle d’ailleurs souvent de la symptothermie comme d’une méthode de planification familiale et non pas d’une méthode de contraception).
Les plus :
- Méthode 100% « naturelle »
- Zéro hormones, zéro corps étranger
- Apprendre à se connaître en s’observant
Les moins :
- Démarche qui repose exclusivement sur la personne assignée femme à la naissance
- Démarche contraignante et rigoureuse
- Risque de grossesse
Pour en savoir plus : www.symptothermie.org
2- LE SLIP CHAUFFANT
Bien moins connue que la symptothermie, la méthode du « slip chauffant » (autrement appelé « remonte-couilles toulousain » car inventée par un gynécologue toulousain) est pourtant plus fiable et moins contraignante… Cette méthode consiste pour la personne dotée de pénis/fémis à porter chaque jour pendant une quinzaine d’heures un slip spécialement conçu à sa taille, qui présente un trou permettant d’en laisser sortir son pénis/fémis, et des lanières permettant d’ajuster ensuite le slip de manière à faire remonter les testicules à l’intérieur du corps. Et c’est tout, rien de plus !
Cette disposition bien spécifique permet de garder au chaud les testicules, empêchant ainsi de produire les spermatozoïdes (qui ne supportent pas la chaleur du corps… Ce n’est pas pour rien que les testicules sont à l’extérieur), rendant la personne stérile aussi longtemps qu’elle continue à porter quotidiennement son « slip chauffant ».
La fiabilité de la méthode est assurée par le contrôle de la fertilité via la réalisation d’un spermogramme après les 3 premiers mois d’utilisation du « slip chauffant ». Un suivi ponctuel peut être envisagé pour s’assurer de l’efficacité continue de la démarche.
Les plus :
- Démarche exclusivement pour les personnes dotées de pénis/fémis (la seule qui existe!)
- Méthode de contraception 100% « naturelle »
- Zéro hormones, zéro corps étranger
- Réversibilité de la stérilité induite par le slip chauffant
Les moins :
- Inconfort les premières semaines d’utilisation
Pour en savoir plus : www.slip-chauffant.fr
en bande dessinée : www.bobika.cool/le-coeur-des-zobs-episode-2-p1 (dont est extraite l’illustration ci-dessus)
Une variante de cette contraception thermique naturelle masculine est le port d’un anneau contraceptif en silicone, à la place du slip chauffant. Pour en savoir plus : https://thoreme.com
3- LA STÉRILISATION VOLONTAIRE
Moins alternative car réalisée par des gynécologues et urologues, la stérilisation reste néanmoins une méthode de contraception largement ignorée du monde médical et quasiment jamais abordée auprès des personnes qui ne veulent pas ou plus d’enfants. En France, toute personne majeure peut pourtant demander à être stérilisée, après avoir respecté un délai de réflexion de quatre mois.*2
Définitive quel que soit le sexe, la stérilisation est réalisée sous anesthésie générale (pour les personnes assignées femmes à la naissance) ou locale (pour les personnes assignées hommes à la naissance). Il s’agit dans les deux cas d’une petite chirurgie ambulatoire (on entre et sort de l’hôpital ou de la clinique le jour-même, pas besoin d’y passer la nuit). Pour les personnes dotées de pénis/fémis, il s’agit de réaliser une petite incision sur le scrotum pour couper le canal permettant aux spermatozoïdes de quitter les testicules. Pour les personnes dotées d’un utérus il s’agit de réaliser une cœlioscopie (on passe une caméra et les instruments à travers un trou dans le nombril et un à deux autres sur le bas-ventre) pour poser des clips sur les trompes ou pour retirer une partie ou la totalité des trompes, empêchant ainsi la fécondation de l’ovule.
Aucune de ces interventions n’a d’impact hormonal (la libido reste la même, les règles continuent normalement). Le caractère définitif et extrêmement fiable de ces interventions permet de vivre une sexualité plus épanouie, sans risque de grossesse.
Il reste cependant compliqué d’accéder à la stérilisation en France, surtout pour les personnes assignées femmes, d’autant plus si elles sont jeunes et sans enfants. Les gynécologues n’hésitant pas à invoquer une prétendue illégalité de cette pratique, à infantiliser leurs patient.e.s et à tenir des discours paternalistes et natalistes, négligeant ainsi leur devoir de conseil strictement médical, de neutralité et d’écoute.*3
Les plus :
- Caractère définitif et extrêmement fiable de la contraception
- Accessible à toute personne majeure, indépendamment de son sexe/genre
- Zéro hormones
- Zéro corps étranger (si réalisé sans clips)
- Action protectrice contre le cancer des ovaires (si salpingectomie totale)
- Gratuité si pratiqué dans un hôpital public
Les moins :
- Nécessite une intervention chirurgicale
Il existe des sites et pages Facebook dédié.e.s à ce sujet, permettant d’en savoir plus, d’échanger avec d’autres personnes concernées et d’obtenir des recommandations de gynécologues ou urologues humainement et médicalement compétent.e.s en la matière :
- www.gynandco.wordpress.com
- https://www.facebook.com/groups/1569467053303817 (accessibles à tou.te.s)
- https://www.facebook.com/groups/1112489118763455 (accessible aux personnes childfree uniquement)
*1 « Contraception: cette pilule qui ne passe plus », documentaire 2017, 36,9° :
*2 Fiche mémo de la haute autorité de santé sur la stérilisation volontaire :
https://www.has-sante.fr/portail/plugins/ModuleXitiKLEE/types/FileDocument/doXiti.jsp?id=c_1528379
*3
FOCUS SUR LES VIOLENCES MÉDICALES
Le milieu gynécologique est, plus encore que d’autres milieux médicaux, propice aux violences médicales. Que ce soit en paroles, en gestes ou en écrits, les gynécologues se permettent trop souvent d’infantiliser, de blâmer, de juger, de blesser, de traumatiser leurs patient.e.s. Une attitude de jugement, le refus de considérer la volonté du/ de la patient.e, une atteinte physique (brutalité, caresse, toucher une personne sans son consentement et/ou sans nécessité médicale, viol – pouvant consister en l’introduction d’un spéculum ou autre outil sans le consentement explicite et préalable de la patiente), des propos sexistes, racistes, validistes, âgistes etc. ne doivent pas être cachés.
Il s’agit au contraire de les dénoncer, en balayant d’un revers de main la prétendue « autorité médicale », qui ne justifie en rien et n’excuse nullement ces propos ou comportements.
Pour ce faire, il est possible de porter plainte, et/ou de faire un signalement auprès de l’ordre des médecins, en n’oubliant pas, le cas échéant, d’écrire également à la direction de l’organisme concerné (hôpital, clinique, centre de soins…). Soyons tou.te.s acteur.rice.s du système de santé en dénonçant ouvertement les violences dont nous avons été victimes, contribuant ainsi à construire un milieu médical bienveillant et sécurisant.