La morphopsychologie

Aujourd’hui je voudrais vous parler de la discipline que j’ai trouvé la plus étrange dans ma formation en naturopathie : la morphopsychologie. J’ai eu beau avoir 35 loooooongues heures dédiées à cette discipline, je dois avouer que je m’en sortais pas si bien que ça. Mais vous allez voir, ça s’explique…

Alors déjà, commençons par définir un peu la chose ! Si je relis tout simplement mon cours, la morphosychologie c’est « l’étude des relations entre la forme du visage et le psychisme de l’individu ». En gros, ça consiste à analyser méthodiquement les traits du visage d’une personne pour en tirer des conclusions sur ses traits de personnalité. C’est présenté comme un outil indispensable pour faire un diagnostic de la personnalité de ses clients quand on est naturopathe, de manière à les mieux les cerner et les accompagner.

Alors, comment ça marche la morphopsychologie ? En bref, on observe attentivement la forme du visage, la taille des yeux, l’orientation du menton, la hauteur du front, la taille de la bouche, la forme des oreilles etc. Et à partir de ces observations, on évalue « les potentialités et les caractères fondamentaux de la personne », ce qui serait censé permettre (je cite) « d’en déduire ses comportements, ses attitudes et ses aspirations ».

Par exemple, un nez retroussé serait le signe d’une dépendance affective forte. Un nez charnu à la base signifierait des besoins affectifs et sexuels importants. De grands yeux seraient synonymes d’une bonne mémoire visuelle, et s’il sont assez écartés ils symboliseraient une ouverture d’esprit et une intuition développée. Ou bien encore, de petits yeux en amandes seraient signe de curiosité.

Le côté droit de notre visage serait censé donner des indications sur le présent, l’avenir et le masculin, tandis que le côté gauche donnerait des précisions sur notre passé et le féminin…

Mais la morphopsychologie a également des prétentions plus « médicales », puisqu’elle permettraient de déduire de l’observation du visage le bon fonctionnement de nos organes.

La bouche et le menton donneraient des indications sur le fonctionnement des organes digestifs et reproducteurs, les pommettes et le nez renseigneraient sur nos aptitudes respiratoires et cardiaques, et le front et les yeux donneraient quant à eux des informations sur le système nerveux. Les lobes de nos oreilles seraient eux proportionnels à notre vitalité.

Et la pratique de la morphopsychologie peut aller jusqu’à tirer des recommandations alimentaires de ses observations. C’était notamment le cas dans les exercices effectués en cours, où notre enseignante a par exemple recommandé à une étudiante d’éviter les aliments mixés et l’a encouragée à se méfier du lait sur la base des ses observations morphospsychologiques. Pour ma part, je me suis entendue dire que je manquais de protéines d’origine animale, il paraît que ça se voyait sur mon visage…

Bon, ok, je sens venir votre question : mais c’est basé sur quoi tout ça ? Hé bien, si je continue la lecture de mon cours, on y apprend que cette discipline s’appuierait «  sur une démarche scientifique issue de la biologie et de la psychologie, mais elle ferait également appel à l’intuition du praticien ».

Et en relisant ce passage, je comprends mieux pourquoi je ne m’en sortais pas si bien en cours de morphopsychologie : l’enseignante pouvait décider à tout moment que je me trompais puisqu’elle fonctionnait principalement à l’intuition (et qu’on ne s’appréciait pas des masses…).

Quant à la dimension scientifique de la discipline, mes cours y reviennent en affirmant que « c’est grâce aux travaux du Docteur Louis Corman que la morphopsychologie a été reconnue vers 1932 comme une science axée sur le principe de parallélisme du psychique et du physique ».

Bon, sauf qu’en réalité, la morphopsychologie ignore totalement la méthode scientifique. Et ce n’est pas parce qu’elle est le fruit des travaux de quelques médecins à la créativité débordante qu’elle peut être qualifiée de scientifique. D’ailleurs, la morphopsychologie emprunte à d’autres pseudo-sciences plus anciennes, qui n’ont pas non plus fait leur preuves, notamment la phrénologie, la physiognomonie, et les tempéraments hippocratiques.

Autre détail qui a son importance : tous les visuels de morphopsychologie que j’ai pu voir jusqu’à présent représentent des visages caucasiens. Alors, je ne dis pas que ça n’existe pas, les modèles racisés, je dis juste que je n’en ai jamais vu et que c’est manifestement une pseudo-science pensée pour des blancs, par des blancs qui se pensent au centre du monde.

Bref, vous l’aurez compris, la morphopsychologie c’est du bon bullshit et je ne la porte pas dans mon cœur.

Pour aller plus loin :